“Compétences culturelles ou compétences interculturelles?”, retour de stage de Nolwenn Gonzalez

Le LABRRI a eu le plaisir de recevoir Nolwenn Gonzalez (Université Laval) comme stagiaire à l’automne 2024.

C’était un plaisir d’approfondir nos liens avec nos membres de l’Université Laval.

Voici un texte pour témoigner de son expérience:

Compétences culturelles ou compétences interculturelles?

La diversification des sociétés, liée aux mouvements de population, permet un enrichissement culturel sans précédent, avec un partage des coutumes et des traditions qui n’a jamais été aussi fort qu’aujourd’hui. Cependant, cette diversification a également un revers. La polarisation de plus en plus flagrante des discours dans les médias et chez les politiciens contribue à créer des divisions profondes au sein de nos sociétés. De plus, le recul de certains droits acquis avec difficulté, tels que les droits des minorités et des migrants, rend nos sociétés de plus en plus fragiles. Cette fragilité se manifeste par une intolérance croissante envers l’autre, qui semble devenir la norme. Les discours de haine et de rejet de la diversité se multiplient, alimentant les tensions et les conflits. Il est donc crucial de promouvoir des valeurs de tolérance et d’inclusion pour contrer cette tendance et construire des sociétés plus harmonieuses et respectueuses des différences.

C’est pourquoi, un petit (ou grand selon les perspectives de chacun) groupe de chercheurs résiste encore et toujours à ces discours polarisants et cherche à développer une société plus tolérante et ouverte, où chacun, peu importe son appartenance à un groupe, puisse trouver sa place et s’épanouir. Inspirée d’Astérix et Obélix, cette formulation illustre la manière dont la recherche interculturelle s’efforce de contrer les tentatives de créer une société homogène, où les diversités seraient effacées au profit de la majorité. L’objectif est de promouvoir des valeurs d’inclusion et de respect des différences culturelles, en mettant en lumière l’importance de la diversité. En résistant aux discours d’intolérance, la recherche interculturelle contribue à façonner une société plus juste et équitable, où la diversité est perçue comme une richesse plutôt qu’une menace.

Dans l’univers de la recherche interculturelle, le champ des compétences interculturelles est vaste et complexe, avec de nombreux termes et définitions qui s’entrecroisent, se remplacent et parfois se confondent. J’ai commencé ma thèse en parlant de compétences culturelles, mais j’ai rapidement constaté que les compétences interculturelles m’étaient jamais bien loin. Malgré les efforts de la recherche pour trouver les termes et définitions les plus adéquats, il n’y a pas de consensus. Pourtant, les compétences culturelles et interculturelles se distinguent l’une de l’autre. C’est pourquoi j’ai décidé de chercher des réponses dans d’autres disciplines, notamment l’anthropologie, ce qui m’a conduite à Montréal, et plus précisément au LABRRI.

Le LABRRI c’est une équipe multidisciplinaire où chacun contribue à enrichir les réflexions des autres. J’ai eu la chance de travailler et d’échanger avec des personnes de différentes disciplines comme les sciences de l’éducation, l’ethnomusicologie ou encore la communication. Que ce soit au laboratoire ou dans un restaurant népalais (venir à Montréal était pour moi l’occasion de pouvoir à nouveau manger népalais !) les échanges avec les autres membres du labo m’ont permis d’enrichir mes connaissances mais également de tisser des liens avec de jeunes chercheurs pleins d’ambitions ! Le point d’orgue de ces échanges a été sans aucun doute la journée d’étude sur les compétences interculturelles. Les discussions sur le modèle des trois savoirs, l’histoire des relations interculturelles au Québec ou encore le sujet des étudiants internationaux ont alimenté des débats plus qu’enrichissants.

L’une de mes principales tâches dans ce stage a été d’effectuer une revue de littérature sur les définitions et les modèles théoriques des compétences interculturelles, ce qui m’a permis d’affiner ma connaissance des compétences interculturelles et de mieux saisir leurs nuances. Travailler sur cette étude m’a donné une vision plus claire de ce concept et m’a même inspiré à proposer un nouveau modèle théorique des compétences interculturelles. En parallèle, j’ai également commencé une autre étude portant sur les ateliers de formation aux compétences interculturelles. Pour passer de la théorie à la pratique, j’aurai la chance d’être formée aux ateliers de situations interculturelles (White et al., 2022), ce qui me permettra d’appliquer concrètement ce que j’ai pu lire dans la littérature scientifique. Ce stage s’inscrit parfaitement dans mes projets de recherche et mes ambitions pour la suite de ma carrière en tant que jeune chercheuse : contribuer à une meilleure connaissance, compréhension et modélisation des compétences interculturelles, et appliquer ces connaissances auprès des prochaines générations de psychologues.

Bien que mon stage au LABRRI soit terminé, je suis enthousiaste à l’idée de poursuivre ces collaborations enrichissantes et de continuer à promouvoir une société plus tolérante et inclusive. Après avoir travaillé sur la théorie, j’ai hâte de passer à la pratique pour contribuer à une société plus ouverte aux diversités. Je vais également avoir la chance de pouvoir présenter des résultats de recherche lors d’un symposium en Australie et de publier deux articles. Que demander de plus !

Nous cherchons tous à rendre notre monde meilleur. Travailler en interculturel signifie s’attaquer aux discriminations, aux rapports de pouvoir et aux différences de référentiels culturels. Cela implique de se remettre en question et de reconsidérer sa propre place dans la société, tout en sensibilisant les autres pour une société plus tolérante envers les diversités. Je retourne à mon laboratoire de recherche avec de nouveaux contacts, des projets de collaboration, et une réponse à ma question principale : compétences culturelles ou compétences interculturelles ? Maintenant, il me reste à mettre à jour tout le manuscrit de ma thèse !

Références

White, B. W., Grégoire, A., & Gouin-Bonenfant, M. (2022). The Intercultural Situations Workshop: Indirect Ethnography and the Paradox of Difference. Journal of Intercultural Studies, 43(2), 283–301. https://doi.org/10.1080/07256868.2022.2041579