Du 10 au 12 janvier dernier se sont déroulées, à Dakar (Sénégal), les Journées d’étude sur la migration et les mobilités, organisées par le groupe de recherche G3.
Le G3 est un groupe de recherche qui réunit l’Université de Montréal, l’Université de Genève et l’Université libre de Bruxelles. Celui-ci a pour objectif « de créer un pôle de recherche unique au sein de la francophonie concernant des enjeux actuels et pressants auxquels les nations tentent de répondre, chacune à leur manière et dans le contexte qui est le leur. Les trois universités partenaires, au cœur de villes qui vivent le phénomène migratoire avec acuité, sont particulièrement bien outillées pour apporter une contribution significative à l’étude des défis identitaires et sécuritaires soulevés par les migrations, en dépassant les clivages classiques: liberté/contrôle, nationalisme/éloge de la diversité, ou encore immigration choisie/subie. Ce projet vise la mise en place d’un agenda de recherche interdisciplinaire conjoint, déployé autour d’axes transversaux (cohabitation, catégories et conformité) et permettant d’aborder les problématiques soulevées dans une perspective comparative. »
Décentraliser la production du savoir sur les migrations
En octobre 2017, des chercheurs des trois universités membres s’étaient réunis à Montréal pour un colloque sur le thème « Gérer les migrations face aux défis identitaires et sécuritaires ». Des comptes rendus des conférences de ce colloque sont disponibles ici et ici.
Pour la première rencontre de 2018, le groupe de recherche a cette fois-ci décidé de se réunir à Dakar, dans le but d’élargir le réseau de recherche et de décentraliser la production du savoir qui privilégie trop souvent les perspectives du nord. Des chercheurs provenant de plusieurs universités et centres de recherches africains étaient ainsi présents, tels l’Université Cheikh Anta Diop (Dakar, Sénégal), l’Institut Fondamental d’Afrique Noire (Dakar, Sénégal) l’Université Gaston Berger (Saint-Louis, Sénégal), l’Université Assane Seck (Ziguinchor, Sénégal), le Laboratoire ouest africain de sciences sociales (Niamey, Niger, et Cotonou, Bénin).
Comme l’a mentionné Andrea Rea (Université libre de Bruxelles) durant le colloque, il est important de diversifier les perspectives dans l’étude et l’analyse des phénomènes migratoires. L’imposition des catégories et concepts du Nord a d’ailleurs été abordé durant le colloque, ainsi que l’importance de prendre en compte le nombre croissant d’études et d’analyses qui émanent des instituts et centres de recherche en Afrique.
Rencontre entre différentes formes de savoir
En plus de cette volonté de décentraliser les sources du savoir sur les migrations (entre pays du Nord et pays du Sud), le colloque avait aussi comme ambition de faire le pont entre le milieu universitaire et les professionnels qui travaillent en dehors celui-ci. Ainsi, des représentant-e-s de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et de l’Institut des droits de l’homme et de la paix ont aussi participé au colloque.
Des discussions ont eu lieu sur la collaboration entre les institutions internationales et les chercheurs. Plusieurs difficultés ont été soulevées, notamment celle de la différence de temporalités. Les organisations internationales comme l’OIM ont besoin de réponses rapides, alors que la recherche de terrain est produite sur la longue durée, ce qui rend la collaboration difficile. Il a ensuite été question des différences de définitions données à certains concepts (migration, mobilité, réfugiés, etc.). La compréhension de la terminologie constitue également un autre frein à la collaboration.
Thèmes et discussions durant le colloque
Durant les trois journées du colloque, 6 panels, regroupant 27 chercheurs, ont été présentés. Les panels ont abordé les thèmes des frontières, des mobilités régionales, des politiques et du droit, ainsi que de la mobilité entre l’Afrique et l’Europe. En plus de ces 4 panels thématiques, deux autres ont été organisés pour la relève. Ainsi, dix étudiant-e-s et postdoctorant-e-s ont pu partager leurs recherches en cours.
La dernière journée a été consacrée aux questions des politiques migratoires, avec la présence de représentant-e-s de l’OIM et de l’Institut des droits de l’homme et de la paix, ainsi qu’à des réflexions autour des enjeux de la formation doctorale. En effet, un des objectifs de ces journées d’étude était de réfléchir à la possibilité d’organiser une école doctorale pluridisciplinaire sur les migrations. Idéalement, celle-ci serait organisée sur une base régulière, en Afrique, dans l’optique de privilégier les échanges entre professeur-e-s et étudiant-e-s des différentes universités partenaires. Les discussions à la fin du colloque se sont ouvertes sur plusieurs possibilités de collaboration entre les chercheurs du G3 et leurs collègues travaillant dans des universités en Afrique, non seulement pour faciliter les échanges entre les différents réseaux, mais aussi pour assurer une relève dans l’étude de la mobilité.
Pour plus d’informations
Le programme du colloque est disponible ici.
Finalement, le magazine radiophonique Espace Publique de Radio Chine Internationale Sénégal a consacré une émission au colloque. L’animateur, Mamadou Niang, s’est entretenu avec plusieurs chercheurs participants au colloque : Bob White (Université de Montréal), Andrea Rea (Université libre de Bruxelles), Pape Demba Fall (Institut fondamental d’Afrique noire, Université Cheikh Anta Diop, Dakar, Sénégal), Hamani Oumarou (LASDEL, Niamey, Niger) France Houle (Université de Montréal), Margarita Sanchez-Mazas (Université de Genève), Elieth Eyebiyi (LASDEL, Cotonou, Bénin) et Mamadou Dimé (Université Gaston Berger de Saint-Louis, Sénégal).