Le 3 octobre 2023, dans un local de l’Université de Montréal, le LABRRI recevait Dr. Fethi Mansouri pour une conférence sur son article Jeunes migrants et capital transculturel: Cadres conceptuels et explorations empiriques.
Au cours de la conférence, la présentation de Dr. Mansouri fut parsemée d’échanges entre le conférencier et son public, dans une ambiance intime et amicale. Pour ma part, ce sont ces discussions qui ont rendu cette conférence intime si productive dans ses conceptualisations et ces critiques.
Tout au long de la conférence, Dr. Mansouri a pris du temps pour expliquer les aspects méthodologiques et conceptuels de sa recherche. Il a commencé par situer son projet géographiquement en expliquant les différentes conceptualisations du « multiculturalisme » dans trois contextes assez différents : Toronto (Canada), Melbourne (Australie) et Birmingham (Royaume-Uni). Il s’agit, selon lui, de trois villes qui sont caractérisées autant par le vivre-ensemble que par des tensions autour de la diversité et de l’immigration.
Son projet, comme il l’explique, tente de répondre aux peurs concernant la migration en démontrant le potentiel positif du capital transculturel des jeunes migrants vivant dans des villes multiculturelles. Alors, cette recherche avait l’objectif de changer le discours populaire selon lequel les migrants n’ont comme options que l’assimilation ou l’ostracisation culturelle.
Pour Dr. Mansouri, en fonction des données qu’il a acquises au travers de nombreuses entrevues dans les trois villes (n=119) et de multiples enquêtes (1384 participants), les jeunes migrants arrivent à naviguer simultanément entre la culture majoritaire, la culture d’héritage et la culture multiculturelle des villes. Ce projet démontre, selon Dr. Mansouri, que ces cultures et ces imaginaires ne sont pas mutuellement exclusifs. Pour Dr. Mansouri, ces influences sont des sources de capital transculturel. Ce capital peut être utilisé positivement par les jeunes , leur permettant d’intégrer la société majoritaire sans nécessairement s’assimiler. Aussi, ce capital leur accorde le pouvoir de rester dans leur culture d’héritage sans s’ostraciser et de naviguer un contexte social multiculturel en appréciant leurs différentes origines.
La première discussion commença à la suite de questions du public concernant la nature positive des analyses présentées. Certaines personnes demandaient si ces résultats positifs pouvaient masquer les nombreuses expériences négatives des jeunes en contexte de migration. Ces résultats positifs peuvent donner une fausse apparence de « parfait » vivre-ensemble et de bien- être. D’autres commentaires exprimaient aussi comment ces résultats n’étaient pas assez critiques des enjeux actuels, c’est-à-dire, ce que les jeunes migrants doivent affronter : racisme systémique, discrimination, ghettoïsation, etc. des enjeux qui semblent difficilement surmontables malgré ce capital transculturel. Il fut aussi question de la différence entre le capital transculturel et ces apports, et le capital national, qui reflète la culture majoritaire et permet rarement l’inclusion transculturelle.
Dr. Mansouri répondit aux questionnements en expliquant que sa recherche cherchait justement à aller à l’encontre de la victimisation constante des migrants dans la recherche académique actuelle. En montrant une optique et des exemples positifs, il répond à la négativité constante des médias et de la recherche académique pour mettre l’accent sur la résilience des jeunes migrants et de leur capacité d’agir (« agency ») malgré les obstacles rencontrés dans leur vie de tous les jours.
Pour conclure, la conférence a permis d’approfondir un questionnement quant à l’origine et les buts de la recherche académique sur les contextes caractérisés par la diversité croissante. Selon Dr. Mansouri, Il est essentiel d’aborder les aspects conflictuels et négatifs associés aux réalités des migrants, pour décrire et critiquer la discrimination et l’assimilation qu’ils subissent. Cependant, il est aussi important d’aborder les pratiques qui leur permettent d’intégrer et de façonner la société dans laquelle ils se trouvent positivement, surtout dans le contexte actuel de peur et de xénophobie des villes analysées lors de sa recherche.
Compte-rendu écrit par Manuel Ariel Soldevila
Lien vers l’annonce de la conférence de Fethi Mansouri:
Pour en savoir davantage sur Fethi Mansouri:
https://www.fethimansouri.com/biography